Dans l’urgence, et malgré l’irresponsabilité des acteurs politiques majeurs, le Pays Basque a su réagir avec imagination et prévoyance en prenant dès le début les mesures strictes qui s’imposaient ; en mettant en place les réseaux d’entraide afin d’accompagner et aider les personnes les plus fragiles ; en organisant des évènements artistiques et culturels originaux ; en multipliant les actions de soutien aux personnes qui luttent en première ligne contre la pandémie; en dénonçant bruyamment la présence des forces armées espagnoles,…
Par contre, il est indéniable que cette crise sanitaire a fait apparaître le manque criant de structures, de préparation et de matériel nécessaires pour contrer une telle situation. Cette crise met en évidence l’absence d’un État basque ; l’impossibilité de prendre des décisions en fonction des besoins et de intérêts des habitant.e.s. Cela démontre également la grande faiblesse du secteur de la santé publique, mais plus largement aussi, du secteur social ; faiblesse, qui est le résultat des politiques néolibérales menées ces dernières années, non seulement par les gouvernements de Paris et Madrid, mais aussi par ceux de Gasteiz et Iruña.
En ce jour d’Aberri Eguna, la situation de crise sanitaire, social et économique met en évidence le besoin et l’importance de créer une république en Pays Basque ; une république dont le fondement sera l’indépendance et dont les valeurs seraient en opposition avec celles véhiculées par la politique néolibérale, c’est-à-dire, des décisions prises en fonction des intérêts d’une minorité et au détriment de la majorité. Sous prétexte de coronavirus, le gouvernement de Sanchez, a pris des mesures drastiques afin de recentraliser les prises de décisions à Madrid, appliquant ainsi un 155 sanitaire. Il a notamment déployé les forces armées espagnoles dans les rues du Pays Basque sud, en passant ouvertement outre des pouvoirs des gouvernements de la Communauté autonome basque ou de Navarre. En Pays Basque nord, le gouvernement de Macron a réagi très tard, et encore une fois, nous n’avons pas pu mettre en place de stratégie au plan national, nous n’avons pas pu réagir comme un seul et même pays.
Aujourd’hui, dans cette situation qui met en évidence le besoin de finir avec le système capitaliste, et les conséquences les plus criantes et cruelles qu’il peut engendrer, le Pays basque est dans l’incapacité de prendre les mesures sanitaires, humanitaires ou économiques nécessaires afin de sortir de cette crise. Nous ne pouvons pas mettre en place des stratégies qui pourraient à l’avenir, nous aider à prendre les décisions justes et nécessaires pour toutes et tous, en construisant un modèle de société qui mettra un terme à la privatisation et à la précarité ; qui mettra la vie et sa préservation au centre des préoccupations ; qui permettra d’assurer à tous les citoyen.ne.s une vie libre et digne. Nous ne pouvons pas, car nous ne sommes pas indépendants, parce que nous n’avons pas les leviers institutionnels. C’est pour cela que nous devons, en ce jour d’Aberri Eguna, réclamer haut et fort un ÉTAT BASQUE.
De la même manière, profitons de cet Aberri Eguna, pour nous souvenir de ceux qui sont en train de souffrir, plus que tous les autres. Aujourd’hui, les personnes qui ont des difficultés pour boucler les fins de mois, sont encore plus en difficulté, les chômeurs, les travailleurs indépendants, les ouvriers à temps plein ou précaires. Nous devons nous souvenir des centaines de personnes qui font face à la maladie, de leurs proches et leurs familles ; nous devons nous souvenir des personnes qui mettent leur propre vie en danger pour les aider, les professionnels de la santé entre autres. Même si nous sommes confinés dans nos maisons, ces différentes situations dramatiques nous touchent, nous peinent, nous révoltent : les femmes et les enfants battus confinés avec leur agresseur, les prisonniers politiques basques, qui ne peuvent recevoir de visites…. A tous ceux-là, nos remerciements les plus sincères, et nos pensées les plus affectueuses.
Nous l’avons répété maintes fois, mais nous ne voulons pas, avec la construction d’une république indépendante, simplement changer de drapeau. Nous voulons construire un État, qui aura un modèle social et économique juste ; nous voulons construire une véritable démocratie, une société où le patriarcat n’aurait pas de place, où l’égalité entre hommes et femmes serait la règle. Une république socialiste et féministe.
Pour toutes ces raisons, nous appelons les citoyen.ne.s à se joindre aux actions organisées pour l’Aberri Eguna par Euskal Herria Batera. Cette action se décline sous la forme d’une mosaïque photo géante, entre aujourd’hui et dimanche matin. Dimanche matin, nous vous demandons de suspendre à vos balcons ou vos fenêtres, des ikurrina ou drapeau navarrais, assortis d’un ruban noir. Montrons que nous sommes un pays solidaire, généreux, digne… en exprimant notre solidarité avec tous les autres pays du monde, et qui se veut être indépendant, maître de son avenir, apportant sa pierre à l’édifice d’un monde meilleur !